Tuesday, March 20, 2012

Hiroshima, mon amour.

Je te rencontre, je me souviens de toi.
Qui es-tu?
Tu me tues, tu me fais du bien.
Comment me serais je doutée
que cette ville était faite à la taille de l'amour?
Comment me serais je doutée
que tu étais fait à la taille de mon corps même?
Tu me plais,
quel événement!
Tu me plais,
quelle lenteur tout à coup,
quelle douceur.
Tu ne peux pas savoir.
Tu me tues.
Tu me fais du bien.
J'ai le temps.
Je t'en prie!
Dévore-moi,
Déforme-moi jusqu'à la laideur.
Pourquoi pas toi?
Pourquoi pas toi dans cette ville
et dans cette nuit pareille aux autres
au point de s'y méprendre?
Je t'en prie
je te rencontre
je me souviens de toi.
Cette ville était faite à la taille de l'amour.
Tu étais fait à la taille de mon corps même.
Qui es tu?
Tu me tues.
J'avais faim,
faim d'infidélités,d'adultères,
de mensonges et de mourir.
Depuis toujours.
Je me doutais bien qu'un jour
tu me tomberais dessus.
Je t'attendais dans une patience
sans borne, calme.
Dévore-moi
Déforme-moi à ton image
afin qu'aucun autre,
après toi,
ne comprenne plus du tout
le pourquoi de tant de désir.
Nous allons rester seuls, mon amour.
La nuit ne vas pas finir.
Le jour ne se levera plus sur personne
Jamais. Jamais plus.
Enfin.
Tu me tues.
Tu me fais du bien
Nous pleurerons le jour défunt
avec conscience et bonne volonté.
Nous aurons plus rien d'autre à faire que,
plus rien que pleurer le jour défunt.
Du temps passera.
Du temps seulement
Et du temps va venir.

Marquerite Duras

Marquerite Duras by Richard Avedon


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